Concrètement, il s’agit de faire bénéficier au patient des meilleurs soins au meilleur moment, en mobilisant les ressources, en particulier humaines, au moment où le soin est requis. A la Clinique Saint Charles, durant la phase qui précède l’hospitalisation, toutes les informations nécessaires sont délivrées au patient, pour le rendre acteur de sa prise en charge, et lui rappeler les consignes avant sa venue.
95 % des patients ne se présentent qu’une heure seulement avant l’intervention, dans une unité spécialement dédiée. Tout est anticipé. Par exemple, une consultation infirmière collective a lieu tous les mercredis, à laquelle sont invités les patients qui seront opérés dans le mois qui suit d’une prothèse totale de la hanche ou une prothèse totale du genou. Ils sont coachés sur ce que l’on attend d’eux avant, pendant et surtout après le séjour. Un film en 3D qui permet au patient de visiter les locaux dans lesquels il va être accueilli et de réaliser virtuellement tout son parcours de soin par anticipation a été aussi produit.
Une unité spéciale d’accueil des patients au bloc opératoire très innovante
Quel que soit le mode d’hospitalisation, ambulatoire ou complète, les patients entrent dans la clinique par une unité dédiée sans passer par leur chambre qu’ils ne rejoignent qu’après le passage au bloc. Le patient est reçu, en tenue de «ville», par une infirmière qui réalise le check-up d’entrée dans un bureau, puis il est dirigé vers une cabine pour se changer avant de partir au bloc. « Nous avons veillé à ce que cette zone soit extrêmement confortable. Elle ressemble d’ailleurs davantage à un spa qu’à une clinique ». En effet, la cabine est décorée de manière apaisante, le patient reçoit un peignoir et dispose d’une tablette pour se divertir. Très prochainement, des lunettes 3D pour créer un contexte quasi-hypnotique avec des images virtuelles pour les patients qui le souhaitent, seront mises à disposition. « Cette prise en charge est très inhabituelle, très démédicalisée. Nous avons autant de cabines que de salles de bloc – la cabine 1 correspond au bloc 1 – donc nous sommes sur une pure marche en avant. Nous fonctionnons ainsi depuis plus d’un an et demie, et les retours sont très positifs », souligne le directeur. Au-delà des questionnaires de satisfaction, des patients ont été invités à déjeuner avec les équipes afin de s’exprimer de manière ouverte sur leur expérience à la clinique. « Nous sommes très satisfaits de ces retours. Les patients L’innovation, une affaire de management et de travail d’équipe apprécient avant tout de ne pas attendre et de bénéficier d’un environnement qui n’est pas stressant. Nous avons concilié une efficience organisationnelle et une réelle qualité de la prestation ».
La consommation de morphine a été divisée par 8
A Saint Charles, la prise en charge de la douleur est multifactorielle et les équipes n’utilisent quasiment plus de morphine. « Nous utilisons les infiltrations de cocktails qui ont des effets d’analgésie locale. En post-opératoire immédiat, nous utilisons la cryothérapie et la pressothérapie. Cette anticipation de la douleur permet de limiter considérablement la consommation de morphine, ce qui est crucial par rapport à ses effets indésirables (troubles de la conscience, troubles urinaires et digestifs, etc.) qui empêchent la récupération rapide et la sortie. Nous avons divisé par 8 la consommation, et nous n’avons plus de pompes à morphine dans les services. Lorsqu’elle est utilisée, c’est par voie orale. En salle de réveil, il n’y a quasiment plus de titrations de morphine, notamment grâce à la cryothérapie. Ce ne sont pas des traitements expérimentaux, mais il faut simplement savoir intégrer les progrès de la science dans nos pratiques quotidiennes ».
La prise en charge anesthésique personnalisée est aussi plébiscitée et le patient retrouve le même anesthésiste avec lequel il a préparé son opération. « C’est un concept simple mais pas si facile à mettre en œuvre », précise M. Hardouin.
L’innovation passe par le management
Comment intégrer ces pratiques, et gérer au mieux les risques per et pré-opératoires ?
« Nos établissements dépendent généralement trop des pratiques individuelles des médecins, et leur niveau de connaissance ou d’intégration de nouvelles pratiques dans leur quotidien est très variable. Cela crée de la confusion et de la complexité pour nos équipes, donc des risques supplémentaires voire des traitements de qualité variable pour les patients. Notre première approche est le travail en équipe pour obtenir des consensus et nous rédigeons des protocoles en intégrant les soins qui donnent les meilleurs résultats ».
Ainsi, à la Clinique Saint Charles, les sujets d’hygiène, de douleur, de nutrition sont discutés selon une approche disciplinaire. Les médecins qui s’occupent de la prise en charge de la hanche, ou du genou, etc… sont réunis autour de la table et les différents aspects de l’hygiène, de nutrition, de douleur, etc. spécifiques sont discutés avec l’aide des experts. « Cela apporte de toute évidence un intérêt croissant pour les médecins et améliore l’efficacité des procédures. Tout le monde y gagne ».
Les durées de séjour sont un point tactique également discuté lors de ces réunions disciplinaires. « Les réticences à diminuer la durée de séjour, passer à l’ambulatoire, sont nombreuses mais elles doivent être exprimées, objectivées, discutées, et faire l’objet d’un traitement réel. Nous déterminons les critères de sortie des patients, et la gestion des risques résiduels. Les médecins de la clinique utilisent un outil nommé ‘Linkeos’ qui permet de suivre à distance le patient et donc de mieux gérer les risques de complication. ». Cette application est incluse dans une mallette remise au patient à sa sortie qui contient des objets connectés pour suivre ses constantes par exemple. Outre une version chirurgie, une version maternité est également remise aux parturientes. « Les patients sont extrêmement satisfaits de cet outil qui les sécurise, car paradoxalement ce suivi est beaucoup plus personnalisé qu’une prise en charge dans une unité de soins traditionnelle. Grâce à toutes ces innovations, nous avons augmenté le niveau de sécurité de soins. La durée de séjour a très fortement diminué : 3 jours pour une prothèse totale de la hanche ou une prothèse totale du genou, tous niveaux de sévérité confondus. Nous avons même une partie de cette activité qui est faite en ambulatoire. Entre 2014 et 2016, nous sommes passés de 60 % à 80 % de prises en charge en ambulatoire, et de 60 à 25 lits d’hospitalisation complète », conclut M. Hardouin.