Les Fédérations hospitalières de France (FHF), de l’hospitalisation privée (FHP) et des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés solidaires (Fehap) demandent des mesures pour compenser une inflation en hausse en 2022 et d’autres facteurs pénalisants, craignant des impacts importants sur leurs finances et investissements.
La FHP s’est appuyée sur une étude qu’elle a commandée au cabinet de conseil Roland Berger, intitulée “l’impact exceptionnel de l’inflation sur les hôpitaux publics et privés en 2022”.
Elle déplore ainsi dans un communiqué diffusé lundi une “double inflation” pour le secteur hospitalier: “l’inflation générale, avec notamment l’envolée des prix de l’énergie”, ce qui représente selon l’étude un coût d’achat attendu en hausse de “26% pour l’électricité et 35% pour le gaz en 2022″ -sans compter la hausse des matières premières-, ainsi qu'”une inflation spécifique au secteur de la santé liée à la crise Covid”.
“Cette hausse des coûts hospitaliers justifie de considérer les hôpitaux comme une infrastructure essentielle, dont la tarification doit prendre en compte l’inflation comme dans les autres secteurs régulés”, dans le cadre de la campagne tarifaire 2022, fait valoir la FHP.
Il est exposé dans l’étude que l’indice des coûts hospitaliers est attendu en augmentation de 3,6% en 2022, “hors frais de personnel”, contre +0,9% en 2020 et +1,5% en 2021.
Selon l’étude, à ces augmentations de coûts s’ajoutent un effet d’inflation sur les frais de personnel, en tension en raison de la crise Covid, ainsi que “les conséquences du ralentissement de l’activité hospitalière” due à la crise sanitaire. La FHP s’attend pour 2022 un niveau d’activité moins important que prévu.
“Une application a minima du protocole pluriannuel fixé avant la crise”, prévoyant notamment une hausse minimale des ressources en médecine chirurgie et obstétrique (MCO) de 0,2%, “ne donnerait pas aux établissements de santé les moyens de fonctionner”, juge la FHP.
Pour couvrir les effets de l’inflation en 2022, elle réclame “une campagne tarifaire exceptionnelle associant une hausse des tarifs” d’au minimum 1% et une “dotation exceptionnelle ‘inflation'” de 2 milliards d’euros “pour l’ensemble du secteur sanitaire public et privé”.
Cela correspond à une “demande de compensation globale équivalente à une hausse de tarif de +3,3%”, estime la Fédération de l’hospitalisation privée.
La FHF craint de devoir “réduire la voilure” sur les “grosses opérations de travaux”
Interrogée par APMnews/TecHopital le 9 février, Cécile Chevance, responsable des pôles finances, data et offre de soins de la FHF, indique que sa fédération “a alerté depuis plusieurs mois les pouvoirs publics” sur cette inflation prévue à la hausse.
Elle a évoqué de “nombreuses remontées d’établissements” sur les révisions des marchés, la pression des fournisseurs “pour élever les prix”, en raison d’une “forte augmentation du prix matières premières”.
“On constate une forte augmentation sur l’énergie, l’alimentation et les transports”, ou encore au niveau des “assurances” et des dispositifs médicaux, a-t-elle mentionné.
La FHF s’inquiète en outre un impact sur les “coûts de travaux et les investissements”. Cécile Chevance a évoqué des hausses de 15% à 30% pour l’ouverture des prix pour “les grosses opérations de travaux”, selon des retours du terrain. “On craint d’être obligés de réduire la voilure”, malgré les aides au titre du volet investissement du Ségur de la santé.
“On ne peut pas réduire l’inflation à la question des seuls tarifs de médecine et de chirurgie”, car elle impacte l’objectif national de dépenses de l’assurance maladie (Ondam) hospitalier et “tous les vecteurs de financement”, c’est-à-dire également les autres activités comme les soins de suite et de réadaptation (SSR) et la psychiatrie.
Par ailleurs, elle a souligné qu’il y a d’autres facteurs à prendre en compte en dehors de l’inflation, comme le fait que “les hôpitaux publics ont été très touchés par une activité en berne” due aux déprogrammations et à l’importante part de séjours Covid captée par le secteur public hospitalier.
“Cela fait deux ans” que le secteur hospitalier a des “sous-exécutions massives” de l’Ondam hospitalier, a rappelé Cécile Chevance.
Elle a prôné une médicalisation des prévisions, en matière financière, une analyse plus précise du fait de la “situation exceptionnelle” due au Covid.
On souhaite que la compensation de l’inflation soit “intégrée dans l’Ondam et tous les vecteurs de financement”, a-t-elle résumé.
Les fédérations “ont pas mal” communiqué entre elles sur le sujet de l’inflation. Une réunion a eu lieu avec la direction générale de l’offre de soins (DGOS) la semaine dernière avec l’ensemble des fédérations, a indiqué la responsable des pôles finances, data et offre de soins de la FHF.
Cécile Chevance a annoncé que la FHF allait constituer un observatoire des prix en association avec les grandes centrales d’achat, notamment UniHA et le Resah.
Cela doit se faire “le plus rapidement possible”, en “février-mars”. L’objectif est de faire une “réactualisation infra-annuelle”.
La FHF réalise “chaque année une étude d’impact financier de différents facteurs”, mais celle d’octobre-novembre 2021 “n’est plus valable” en raison notamment des impacts de l’énergie récemment mesurés, a expliqué Cécile Chevance.
La Fehap explique partager les “mêmes préoccupations”. La fédération s'”inquiète face aux alertes des adhérents qui font face aux hausses des coûts sur les postes énergie, alimentation et assurances notamment”, a-t-elle expliqué le 10 février à APMnews/TecHopital.
La fédération “demande la prise en compte des impacts financiers pour tous les secteurs de l’offre de soins” et ce, “quel que soit le secteur”.
“Nous sommes en attente d’une méthodologie DGOS pour objectiver l’impact de l’inflation et consolidons actuellement une enquête d’impact sur le sanitaire”, a-t-elle précisé.
L’Insee prévoit une inflation située entre 3 et 3,5% au premier semestre 2022, en glissement annuel, selon un point de conjoncture daté du 8 février.